samedi 23 juin 2007

Enjeux Juridiques de l'Industrie du Jeu Vidéo


Le 17 novembre 2006 se tenait à l'Université de Poitiers un colloque dont je m'étais fais l'écho ici-même, intitulé "Enjeux Juridiques de l'industrie du jeu vidéo".

Certaines interventions ont depuis été mises en ligne sur le site de l'Université à savoir :

- "L’oeuvre de création de jeu vidéo" par Monsieur Dominique BOUGEROL, Docteur en Droit, Chercheur associé au CECOJI;

- "Le marché du jeu vidéo et le droit de la concurrence" par Madame Florence CHERIGNY, Maître de conférences à la Faculté de Droit et des Sciences sociales de Poitiers;

- "Les contrats de la production du jeu vidéo" par Maître Gilles VERCKEN, Avocat au Barreau de Paris;

- "Les jeux en ligne : quels enjeux juridiques ?" par Maître Pascal KAMINA, Maitre de Conférences à la Faculté de Droit et des Sciences sociales de Poitiers, Avocat au Barreau de Paris.

vendredi 22 juin 2007

Réactions en chaînes sur Manhunt 2

Les réactions se suivent et se ressemblent quant à l'accueil du dernier jeu du développeur Rockstar Games, Manhunt 2, prévu pour une sortie initiale le 10 juillet sur les consoles PS2 et Wii.

Le Bureau britannique de classifications des films, le BBFC, avait ainsi refusé de classer le jeu, interdisant ainsi sa commercialisation en Grande-Bretagne.

L'Irlande avait précédé de peu le BBFC, en interdisant la veille le jeu par le biais de l'Office de censure des films irlandais, l'IFCO.

La polémique a ensuite gagné les Etats-Unis où l'ESRB a décidé de donner à Manhunt 2 la classification "Adults Only". Le jeu n'est pas donc interdit mais c'est tout comme. La grande distribution refuse de mettre en rayon des jeux "AO". Et les consoliers eux-mêmes, Sony et Nintendo, ont une politique plutôt stricte sur les jeux ayant reçu la classification "AO" : celle de refuser qu'un tel jeu sorte sur leurs consoles.

Le gouvernement italien a conclu le bal des réactions en menaçant d'interdire purement et simplement le jeu sur son territoire, qui selon un des ministre, "est un encouragement à la violence et au meurtre".

Il va sans dire que l'Allemagne qui n'a pas encore réagi, n'aurait pas permis la sortie du jeu du fait de son système de classification géré par l'USK reconnu pour sa sévérité.

La France, à travers le Ministère de la Culture, et qui faisait presque exception, a rappelé sa confiance dans le système européen PEGI tout en soulignant sa vigilance.

Devant une telle levée de bouclier, Rockstar Games, pourtant habitué à la polémique autour de ses jeux dont l'exemple type est la licence GTA (Grand Theft Auto), et jouant de cette polémique et du caractère subversif et sulfureux de ses jeux, n'avait pas prévu l'ampleur des réactions.

Résultat : Take-Two Interactive Software, l'éditeur du jeu, a donc décidé de suspendre pour le moment le lancement de "Manhunt 2" et de réfléchir à l'issue du problème. Plusieurs solutions s'offrent à l'éditeur : maintenir le jeu en l'état et se passer du marché des consoles pour se contenter de celui du PC ; modifier en profondeur le jeu pour lui permettre une classification qui conviendrait aux consoliers ; ou bien abandonner tout simplement le lancement du jeu.

Avant de terminer, notons tout de même le silence surprenant de PEGI durant toute cette semaine alors que le système de classification PEGI s'applique pourtant au Royaume-Uni, en Irlande et en Italie.

La suite au prochain épisode.

mercredi 20 juin 2007

Pas de "Chasse à l'Homme 2" en Angleterre


La BBFC, ou British Board of Film Classification, est ce que l'on appelle en France, une AAI : une Autorité Administrative Indépendante. La BBFC est en Angleterre ce la que le CNC est en France : l'autorité de régulation des films. Mais à la différence du CNC, la BBFC encadre également les jeux vidéo.

Et c'est dans le cadre de sa mission de classification des jeux que la BBFC vient de prendre une décision singulière : le rejet pur et simple d'un jeu : Manhunt 2.

Le communiqué officiel justifie la décision en ce que "Manhunt 2 se distingue de la récente production jeu vidéo par son caractère extrêmement sordide et sa tonalité extrêmement dure dans un contexte général encourageant constamment les formes les plus cruelles de meurtres, en n'offrant au joueur qu'étonnament peu de répit ou de recul".

Le dernier jeu dont la BBFC refusa la classification était Carmageddon, en 1997. La décision fut cependant anéantie en appel. Appel qui reste une option envisageable pour Rockstar, l'éditeur du jeu, selon le Video Recordings Act.

Les conséquences d'un tel rejet de classification sont claires : le jeu Manhunt 2 ne sera tout simplement pas commercialisé en Angleterre.

mardi 19 juin 2007

Microsoft et Immersion : les affaires continuent mais au tribunal


Au moment où les rumeurs vont bon train sur l'éventualité pour Sony de présenter un nouveau modèle de manette utilisant les fonctions vibrantes issues des technologies de la société Immersion, cette dernière fait également parler d'elle sur le terrain judiciaire.

En 2002, Immersion attaquait en justice Sony et Microsoft sur la base d'une contrefaçon de brevet.
Sony, qui avait décidé d'aller jusqu'au bout, perdit le procès.
Microsoft de son coté, évita de se lancer dans une bataille juridique hasardeuse et préféra conclure avec la société Immersion plusieurs accords de licence en 2003.

Or il s'avère que Immersion a, selon les avocats de Microsoft, manqué à ses obligations contractuelles. Ce qui explique la récente poursuite engagée par Microsoft contre la société Immersion en vue d'obtenir l'exécution des contrats conclus en 2003.

lundi 18 juin 2007

Nintendo, poursuivi pour contrefaçon de brevet


Une console qui a du succès est une console dont les risques de subir des poursuites judiciaires augmente.

Suivant cette logique, la Wii de Nintendo fait à nouveau parler d'elle sur une question de contrefaçon.

La société Lonestar Inventions LP basée au Texas vient ainsi d'attaquer Nintendo sur le fondement d'une atteinte à l'un de ses brevets. Selon Lonestar, la Wii utilise sans droit, une technologie brevetée en 1993 à propos d'une disposition particulière en parallèle de condensateur permettant un gain d'espace et de capacité des semi-conducteurs.

Lonestar a par ailleurs poursuivi en justice d'autres sociétés pour contrefaçon du même brevet et déjà négocié des accords de licences d'exploitation.

jeudi 14 juin 2007

Saisie de 35 000 contrefaçons de jeux



Le secteur du jeu vidéo n'est pas épargné par le phénomène de la contrefaçon à grande échelle.

Ainsi la douane française a annoncé mercredi avoir saisi à l'aéroport de Roissy plus de 35 000 jeux contrefaisant la marque Sony Playstation.

C'est lors d'un contrôle sur un chargement en provenance de Syrie et à destination de l'Uruguay que les douaniers ont découvert le 31 mai les DVD, dont la marque a rapidement confirmé le caractère de contrefaçon, au regard des défauts constatés, selon le communiqué de la direction générale des dounes.

Parmi ce chargement, les douaniers ont découvert 24 000 exemplaires du jeu "Spiderman 3".

Jeux violents et Conseil de l'UE - suite


Il est intéressant de voir comment l'Union Européenne prend soin du secteur du jeu vidéo, un médium apparemment encore considéré comme à part.

Alors que le crédit d'impôt français en faveur du secteur est toujours en discussion depuis de longs mois auprès de la Commission, l'Union concentre ces efforts sur l'aspect polémique, et ce malgré 30 ans d'existence, de la violence du médium.

Ainsi le Conseil des ministres européens de la justice et des affaires intérieures qui se tenait à Luxembourg les 12 et 13 juin dernier a débouché sur les conclusions suivantes :

"LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE

PREND NOTE du fait que, même si la majorité des États membres ne traitent pas spécifiquement, dans leur code pénal, des médias qui font l'apologie de la violence, plusieurs dispositions de ces codes sont applicables. Ces dispositions prévoient des sanctions sous forme de peines d'emprisonnement ou d'amendes.

NOTE avec satisfaction que, dans tous les États membres, il existe des dispositions en vigueur visant à protéger les mineurs afin qu'ils n'aient pas accès aux médias qui font l'apologie de la violence. Les États membres disposent de diverses lois répondant à cet objectif. Cependant, dans tous les États membres, la législation sur la protection des enfants et les lois relatives à la télévision et à la radiodiffusion, ainsi que celles relatives aux médias et à la publicité, contiennent des dispositions suffisantes pour assurer le respect des exigences dans ce domaine et prévoir des
sanctions.

SOULIGNE qu'il importe de rester attentif à l'évolution dans le domaine des jeux vidéo violents, et encourage dès lors les États membres à améliorer et à poursuivre l'échange d'informations sur cette question importante et à promouvoir, le cas échéant, une coopération renforcée entre les États membres les plus touchés par ce phénomène. À cet égard, il pourrait être utile aux États membres d'échanger des informations en ce qui concerne les jeux vidéo violents qui ont été rendus inaccessibles aux mineurs ou qui devraient l'être.

ENCOURAGE les États membres à étudier toutes les possibilités qu'offrent les instruments de l'UE en vigueur, et escompte que les autorités compétentes des États membres coopéreront étroitement avec EUROJUST et EUROPOL, ce qui permettra à ces autorités de bénéficier de l'expérience acquise dans ce domaine."

Quelques remarques s'imposent à lecture de ces conclusions :
  • - on peut se poser la question de savoir si le système de classification PEGI, issu de l'auto-réglementation des éditeurs et développeurs de jeux et qui concerne 16 pays sur 27, ne va pas être remis en cause ou tout simplement supprimé pour se voir remplacé par un système publique européen.
  • - l'harmonisation souhaitée par le Conseil risque cependant de restée lettre morte vu les différences d'appréciation des systèmes nationaux. Citons le système allemand déjà très stricte qui n'a permis la sortie de certains jeux ("Gears of War" et "Dead Rising") et dont la question d'une réforme aboutissant à un système plus stricte encore réapparaît régulièrement tel un serpent de mer.
  • - la volonté de légiférer sur les jeux vidéo violents n'est pas propre à l'UE ni à l'Allemagne qui vient de présider pendant 6 mois l'UE. Plusieurs Etats des Etats-Unis ont, au cours des années précédentes, tenté d'interdire purement et simplement les jeux violents, sans succès toutefois, face au puissant premier amendement consacrant la libre expression.

mardi 12 juin 2007

Les Dispositifs d'aide au Jeu Vidéo


Le site de l'Agence Française pour le Jeu Vidéo vient de publier en partenariat avec le Pôle Financement de L’innovation de Lowendal Masaï un récapitulatif des différentes aides fiscales en faveur du secteur du jeu vidéo.

Trois systèmes intéressent directement le secteur :
  • - le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) qui porte sur les dépenses en matière de Recherche et Développement mais dont l'usage est délicat,
  • - la Jeune Entreprise Innovante (JEI) dont l'objet est également la R&D et qui permet des exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale pour les personnels engagés dans les projets de R&D,
  • - le futur Crédit d’Impôt Jeu Vidéo (CIJV) spécialement dédié au secteur du jeu vidéo mais dont l'entrée en vigueur est suspendue à une décision de la Commission Européenne et dont la condition de critère "culturel" est encore assez floue.
Pour plus de détail sur les conditions d'obtention de ces différentes aides, je vous conseille vivement d'aller lire le dossier sur le site de l'AFJV.

dimanche 10 juin 2007

Law Summit



Les 16 et 17 août prochain se tiendra à Seattle l'Entertainment Technology Law Summit.

Cette réunion annuelle est l'occasion pour les professionnels du secteur d'aborder différents type de questions de questions juridiques.

L'édition prochaine s'intéressera notamment au jeu vidéo sous la question : « Développement de jeux vidéo : Les nouveaux modèles de financement et de développement ». Ce thème abordera les problèmes liés à l'ouverture d'un studio de développement et ceux concernant la musique ou les films dont certains jeux s'inspirent.

Pour plus d'informations : ici.

Eglise d'Angleterre, polémique sur Resistance: Fall of Man

La reproduction de la cathédrale de Manchester comme terrain de bataille dans le jeu "Resistance : Fall of Man" paru au moment de la sortie de la dernière console de Sony, la Playstation 3, n'est pas du goût de l'Eglise anglicane.

L'Eglise menaçant Sony de poursuites judiciaires, demande déjà à la firme japonaise :
- des excuses pour avoir utiliser la cathédrale,
- le retrait du jeu du commerce ou des modifications du passage de la cathédrale,
- une donation substantielle prise sur les profits du jeu et destinée au département éducatif de la cathédrale,
- et le support de Sony aux association de lutte contre le crime .

Selon les déclarations de l'évêque de Manchester, le problème se situe sur le terrain moral. En effet, celui-ci a pu déclaré "Qu'une société multinationale recréée une version photo-réaliste de l'une de nos grandes cathédrales et encourage les gens à y livrer des fusillades est littéralement incroyable et hautement irresponsable" et d'ajouter "Nous sommes choqués qu'un lieu de savoir, de prière et de patrimoine soit présenté à la jeunesse comme un endroit où des armes à feu peuvent être utilisées, a ajouté le révérend Rogers Govender. C'est très important. Pour beaucoup de jeunes, ces jeux offrent une réalité différente et voir des fusils dans la Cathédrale de Manchester n'est pas le genre de connexion que nous voulons faire." Le fait de représenter un lieu saint dans un jeu violent serait donc un "sacrilège".

Le terrain moral semble encore être la seule explication de cette polémique au regard de l'intervention de l'association anglaise "Mothers against Violence" qui déplore le fait que l'action se passe dans la cathédrale d'une ville agitée fréquemment par la violence réelle et mortelle de ses quartiers.

Car sur le terrain juridique, il semble que Sony, qui déclare en outre avoir eu toutes les autorisations nécessaires, soit dans son droit.

En droit de la propriété intellectuelle, le propriétaire actuel de la cathédrale ne détient aucun droit d'auteur susceptible d'avoir été violé par la reproduction du bâtiment dans le jeu. Car comme en droit français, le droit d'auteur anglais, le copyright, a comme durée 70 ans après la mort de l'auteur. On se doute qu'en l'espèce, les 70 ans post mortem sont largement dépassés.

Reste alors à se tourner vers le droit des biens. En droit français, la jurisprudence a pendant longtemps fait preuve de souplesse sur la question de l'exploitation de l'image d'un bien. En mai 2004, un revirement met fin à cette interprétation en précisant que le "le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci, mais peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image par un tiers, lorsqu’elle lui cause un trouble anormal." Et ce trouble est d'autant plus difficile à définir lorsque le bâtiment concerné est un bâtiment accessible au public. L'anormalité du trouble pourrait-elle alors être une atteinte à la sensibilité ?

Selon le juriste anglais Alex Chapman, il faut se rendre à l'évidence : "Le fait est que l'image des bâtiments architecturaux les plus en vue sont souvent reproduits dans les jeux vidéo et les films, et la justice a pris pour habitude de donner raison à ceux qui les utilisent. Il font partie du paysage et les industries du cinéma et du jeu vidéo ont la décence de toujours demander la permission aux responsables de ces monuments avant de les faire figurer dans leurs oeuvres. Dans le cas de Resistance, ce serait sans doute la même chose aux yeux de la loi. [...] De mon point de vue, l'Eglise aurait bien du mal à poursuivre Sony sur ces motifs".

Reste que l'affaire, prise au sérieux, a déjà fait l'objet d'un reportage de la BBC et la polémique ne cesse d'enfler.

vendredi 1 juin 2007

L'association Familles de France attaque en justice Second Life


D'après le site "Ecrans", l'association "Familles de France" a décidé d'attaquer, par assignation en référé devant le Tribunal de Grande Instance de Paris, l'éditeur et hébergeur du site Second Life, Linden Lab dont le siège est basé à San Francisco, mais aussi, à titre subsidiaire, une dizaine de fournisseurs d'accès internet (les FAI) tels Orange, Free ou Neuf.

L'association bien connue des joueurs demande à ce que l'accès au site communautaire soit effectivement bloqué pour les mineurs. Et à défaut, Familles de France exige l'interdiction pure et simple du site en France.

Il faut dire que Second Life tout comme Internet propose du contenu très explicite.

Le communiqué de presse de l'association explique que "de véritables photos et vidéos pornographiques en libre accès placardent certaines régions. Les utilisateurs ont la possibilité de mimer des rapports sexuels, allant même jusqu’à des scènes de viol, de bondage, de zoophilie et de scatophilie. Des passerelles entre l’univers virtuel et des sites internet de pornographie permettent à l’utilisateur d’être redirigé rapidement."

Comme dans la célèbre affaire "Yahoo", cette assignation de Linden Lab pose diverses questions juridiques. En matière de droit international, se poseront les questions de la loi applicable et celle du juge compétent. La question du filtrage d'un site internet par les FAI sera également une nouvelle fois au coeur des débats.

Mais cette affaire pose avant tout la question de l'efficacité des mesures de protection parentales.

Affaire à suivre donc.