mercredi 29 août 2007

Retour sur un été chargé

Délaissant le blog ces dernières semaines pour cause d'un été particulièrement studieux, le moins que l'on puisse dire est que l'actualité juridique du jeu vidéo ne prend pas de vacances. Ce billet sera donc consacré à un récapitulatif des nouvelles récentes.


Microsoft face au rayage des disques.


La Xbox 360 dont la fiabilité était l'objet d'un précédent billet a fait de nouveau parler d'elle cet été. Une première action colective - class action - a été lancé en juillet contre Microsoft en Floride , puis une seconde action début août en Californie. Sa console a la fâcheuse tendance à rayer les disques, ce qui les rend inutilisable au bout d'un moment. Pour ceux que cela intéresse, le texte de la première assignation est disponible sur le site de Joystiq.


Il faut rappeller qu'en France, l'action collective, aussi appelée action de groupe reste toujours et encore une arlésienne de la vie juridique française. Quant aux dernières propositions de texte, elles limitent tant ses conditions d'applications que ses effets au risque de vider de son intéret une action de ce genre.


L'affaire Andrew Wilson v. Sony Computer Entertainment America Inc.

Sony de son coté vient de mettre un terme à une action en justice exercée par des salariés travaillant sur ses jeux pour non paiement d'heures supplémentaires. L'action a été lancée aux Etats-Unis, en Californie par des employés (anciens et actuels) de Sony Computer Entertainement America (SCEA) sous la forme d'une class action en février 2005. Un accord a finalement été trouvé pour mettre fin à l'action, SCEA devra finalement payer environ 8,5 millions de dollards aux salariés demandeurs.

Comme le souligne le site GameDaily, ce n'est pas le premier cas du genre : Electronics Arts (en avril 2006) et Activision (en février 2006) ont eux aussi eu affaire à la justice pour le non paiement d'heures supplémentaires.

Les compagnies avaient en réalité eu recours au subterfuge consistant à donner au salarié une certaine qualification, les exemptant alors de payer les heures supplémentaires effectués.

On peut faire le parallèle en France avec la catégorie des cadres qui sont soumis au fameux forfait. Pour plus d'informations, je vous renvoie directement sur le site du Ministère du Travail.


Take Two n'est pas en reste.

Fin juillet, l'ancien directeur juridique (general counsel) et l'ancien directeur comptable (CEA) (indiquez moi si je fais une erreur de traduction de fonction) ont tous deux plaidé coupable dans une affaire de stock option antidatés. L'ancien directeur général (CEO) avait fait de même en février dernier.

Plus d'infos sur news.com


Les Etats-Unis et les lois relatives aux jeux vidéo violents.

Depuis quelques années, plusieurs Etats américains ont tenté d'encadrer voir plus radicalement d'interdire les jeux vidéo dits violents. L'un des Etats les plus actifs en la matière est la Californie. En décembre 2005, le juge fédéral Ronald Whyte qui avait été saisi notamment par l'ESA (Entertainment Software Association) et la Video Software Dealers Association (VSDA) sur la législation sur les jeux vidéo violents tendant à les interdire aux joueurs de moins de 18 ans, sans distinction, avait par injonction stoppé temporairement courant décembre 2005 la loi signée alors par le Gouverneur Schwarzenger mais déclarée anticonstitutionnelle au regard du 1er amendement consacrant en droit fédéral américain la liberté d'expression.

Extraits : "Pour le moment, il n'a pas été démontré que les jeux vidéo violents tels que les définit la loi, en l'absence d'autres médias violents, portent préjudice aux enfants". "De plus, aucune preuve n'a été établie selon laquelle ces jeux vidéo, de par leur nature interactive ou quoi que ce soit d'autre, soient plus néfastes que la violence à la télévision, dans les films, ou sur les sites Internet."

(si vous êtes intéressés par le document, vous pouvez le consulter ici)

Début août, l'injonction est devenue définitive, la loi de 2005 ne pourra jamais entrée en vigueur. Sauf que le Gouverneur a décidé de faire appel du jugement rendu par le juge Ronald Whyte.

Pourrait-on voir pareil feuilleton législatif en France ? Non, le juge français ne peut en aucun cas exercer un contrôle a posteriori sur la constitutionnalité d'une loi une fois celle-ci promulguée. Le contrôle est donc a priori effectué par le Conseil Constitutionnel lorsque celui-ci est saisi de la question.


Poursuite en justice croisées

Premier acte : Silicon Knight poursuit en justice la société Epic Games qui lui a fourni le moteur graphique Unreal Engine pour le développement d'un jeu très attendu : Too Human. SK estime que Epics lui a présenté une version du moteur qui n'était pas finale et préféré donner la priorité à ses propres jeux "Unreal Tournament 2007" et surtout "Gears of War" qui s'est très bien vendu à Noël dernier. En somme, SK poursuit son fournisseur pour inexécution, partielle du contrat. Pour une lecture en détail des prétentions du développeur anglais, vous pouvez les lire sur le site de Gamasutra.

Deuxième acte : la meilleure défense étant l'attaque, Epics agit en justice contre son client et argue d'un détournement du moteur graphique fourni à Silicon Knight qui aurait utiliser ce moteur pour développer le sien propre.

D'un coté une violation d'engagements contractuels, de l'autre violation du droit d'auteur sur un logiciel, le tout sur un fond de concurrence, la suite de cette passe d'arme qui a tout l'air d'un réglement de comptes promet.


Le Québec français !

En France, la défense de la langue française se fait peu ou proue à l'aide de la loi Toubon. Au Québec, il existe la Charte de la langue française dont l'article 51 dispose que "Toute inscription sur un produit, sur son contenant ou sur son emballage, sur un document ou objet accompagnant ce produit, y compris le mode d'emploi et les certificats de garantie, doit être rédigée en français", et l'article 52.1 : "Tout logiciel, y compris tout ludiciel ou système d'exploitation, qu'il soit installé ou non, doit être disponible en français, à moins qu'il n'en existe aucune version française. Les logiciels peuvent être disponibles également dans d'autres langues que le français, pourvu que la version française soit accessible dans des conditions, sous réserve du prix, lorsque celui-ci résulte d'un coût de production ou de distribution supérieur, au moins aussi favorables et possède des caractéristiques techniques au moins équivalentes." Cela vaut donc pour les jeux vidéo, c'est ce qu'a rappelé la Ministre Christine St-Pierre cet été. Plus d'infos ici.


Blizzard dans la tourmente chinoise.

L'éditeur de World of Warcraft avait fait sensation il y a quelques en s'attaquant aux gold famer. Or ces derrières ces gold farmers se cachent bien souvent de véritables sociétés basés en Chine. Exemple type de l'utilisation d'une action en justice à des fins politiques, une société basée à Pékin, Founder Electronics, vient de lancer une action en justice contre Blizzard pour violation de la propriété intellectuelle sur des polices de caractères ...



Nintendo, presque tranquille
Nintendo a passé un été plutot calme si ce n'est une saisie record de plus de 15 000 jeux contrefaisants au Mexique, le total s'élevant pour l'année en cours à environ 100 000 contrefaçons. La rançon du succès pour Nintendo ?


Et le meilleur pour la fin :bientôt la taxe pour copie privée version consoles de jeux ?

Les dernières consoles de salon disposent toutes d'une capacité de stockage plus ou moins large : disques durs pour la PS3 et la Xbox 360, mémoire flash pour la Wii. La commission d'Albis dans sa volonté d'étendre la redevance pour copie privée à tous les supports numériques a envisagé lors de sa dernière réunion du 9 juillet, une nouvelle piste de réflexion : son application aux consoles de jeux. Seuls les disques durs internes d'ordinateur ont pour l'instant été exclus de l'assiette de la taxe.

L'extension de la redevance aux consoles de jeux répond à une double logique : la capacité de stockage grandissante de ces consoles qui deviennent de véritables plateformes multimédia permettant d'y copier de la musique ou de la vidéo. Microsoft propose par exemple de la VOD sur la 360 et Sony ne va pas tarder à le faire.

Mais cette extension montre les limites du raisonnement de la commission.
D'une part, la première fonction des disques durs présents dans les consoles est le téléchargement de jeux (anciens ou nouveaux), ou de mises à jours.
D'autre part, la qualification d'externe donnée par la commission aux disques durs des consoles est très critiquable, s'ils sont certainement amovibles, sont loin d'être externes puisqu'ils ne peuvent fonctionner que couplés à la console.
Enfin le fait de taxer pour copie privée les consoles de jeux a quelque chose de vraiment coquace puisque les acteurs du jeu vidéo ne touchent pas un centimes sur les redevances perçues.